En général, j’imagine dans ma tête et j’embarque les gens avec moi et ça se passe plutôt bien. Il n ‘y a pas grand-chose que je refuse, sur une commode, avec des cordes, debout, assise, dans la baignoire, avec des jouets, avec un gode ceinture, un gode chair, en regardant l’autre se masturber sans avoir le droit d’y toucher de suite, les yeux bandés… tant que je sens que ça fait monter le plaisir. 

Ta première émotion érotique…

J’ai eu une expérience difficile quand j’avais 9 ans… Cela arrive souvent, dans des conversations, cette question de « la première fois ». Déjà, on ne sait jamais ce que ce terme recouvre. Parfois, moi je dis « ma re-première fois » et les gens un peu sensibilisés aux violences comprennent mais c’est toujours un peu compliqué… 

J’ai eu une amnésie post-traumatique jusqu’à mes 15 ans. Donc, avant mes 15 ans, je découvre la sexualité de manière classique. J’avais des copains à l’époque, ma première pénétration par un phallus c’était à 14 ans le 14 février avec des roses, c’était hyper classique. J’étais quand même dans un environnement particulier, dans un collège non mixte catholique donc je pense qu’à l’époque il n’y avait pas trop de place pour réfléchir autrement.

Après la levée de mon amnésie, c’est devenu un peu plus chaotique, il a fallu un peu de temps pour se retrouver. Il demeure encore certaines choses aujourd’hui. Je ne sais pas si un jour je m’en déferai complètement mais ce n’est pas le cas aujourd’hui. Alors que j’ai une vie sexuelle assez riche avec pas mal de partenaires et des expériences sympathiques multiples, cela m’est déjà arrivée d’être avec quelqu’un pendant 8 mois sans que la pénétration soit possible. Encore aujourd’hui, il y a parfois des moments où c’est plus difficile, soit parce que je suis dans une phase où c’est compliqué, soit parce que tout d’un coup il y a une image, un geste qui ravive une mémoire du corps qui fait que, brusquement les choses se bloquent. Quand tu avec une personne juste pour passer un bon moment, tu arrives plus facilement à passer un peu à autre chose. Quand c’est quelqu’un avec qui tu es plus engagée, c’est sûr que si c’est possible d’en parler c’est plus facile pour débloquer un peu les choses…

L’entente avec ton corps…

Les gens qui côtoient mon corps considèrent que je n’en prends pas assez soin. Je suis quelqu’un qui ne se maquille pas, je ne mets pas de crème ni sur mon visage ni sur mon corps. J’ai beaucoup de mal à aller voir des médecins par exemple, même prendre des médicaments quand j’ai mal c’est difficile. Les gens m’interrogent souvent en me disant « mais tu t’en fous d’avoir mal, pourquoi tu le traites comme ça ? » Je le sais, je suis souvent en conflit entre ma tête et mon corps et de temps en temps c’est assez conscient : je lui fais payer.

Quand dans ma vie érotique, pendant un certain temps le plaisir n’est plus là, qu’il y a vraiment un blocage, je peux le malmener et me mettre dans des situations à risque. Je me dis “ tu vas te débloquer au forceps s’il faut mais il va falloir y aller”. C’est un schéma que je retrouve souvent même si je ne me suis jamais auto-mutilée ou des choses comme ça.

Parlons auto-érotisme…

J’ai toujours eu des conversations érotiques avec mon corps et cela m’apporte toujours du plaisir et du soulagement. J’utilise très peu de jouets toute seule alors qu’ils font partie intégrante de ma vie sexuelle partagée par ailleurs. Quand je me masturbe, je pense souvent au plaisir des gens avec qui je fais l’amour régulièrement. Le désir de l’autre et son plaisir ça m’excite beaucoup, j’ai pas mal de conversations “sextuels” que je lis et re-relis. Avec nos téléphones, il est facile de rechercher un mot précis que je sais être dans telle ou telle conversation.

Je consomme du porno environ une fois toutes les 6 semaines, ce n’est pas fréquent mais ça m’arrive. Je sais que ne je fais pas les mêmes recherches dans les moments où je ne suis pas bien avec mon corps que dans les moments où c’est plus festif. J’ai tendance à consulter des choses dont je ne me sens pas super fière, ça fonctionne sur le moment mais ce n’est pas un plaisir qui me laisse un goût très agréable… Dans le porno, il y a des moments où tu cherches à faire, entre guillemets, les choses bien avec du contenu fait de façon plus responsable. Mais les contenus ne correspondent pas toujours à l’excitation et ne permette pas de “décharger” rapidement.

Parlons excitation sexuelle avec un.e ou des partenaires…  

Si je fais l’amour avec un homme, la plupart du temps c’est avec des plaisirs concomitants alors qu’avec une femme, c’est souvent centré sur le plaisir de l’une ou de l’autre. Cela ne se joue pas vraiment de la même façon, ce ne sont pas les mêmes choses qui excitent. Sentir le désir de l’autre, dans tous les cas pour moi, c’est réellement ce qui déclenche une réponse dans mon corps. Sentir le désir de l’autre m’excite beaucoup ! 

J’aime vraiment faire plaisir, ça c’est vraiment mon truc. J’ai pas trop de modèle, je suis assez créative, j’aime bien varier les lieux, les positions… J’ai souvent eu des amants et amantes qui sont un peu impatientes et pressées et je leur dis que j’aime bien qu’on prenne son temps. Mais à d’autres moments faire l’amour sur le pas de la porte j’aime bien aussi ! Même des zones  érogènes qui ne sont pas forcément convié à chaque fois comme les pieds, les orteils, si c’est fait avec plaisir et que ça arrive, ça peut pas mal m’emballer. Je suis assez fan quand on me lèche les lobes d’oreille ; il y a la respiration de l’autre qui est vraiment tout près et comme c’est un bon indicateur du désir du partenaire, ça m’excite pas mal…

En général, j’imagine dans ma tête et j’embarque les gens avec moi et ça se passe plutôt bien. Il n’y a pas grand-chose que je refuse, sur une commode, avec des cordes, debout, assise, dans la baignoire, avec des jouets, avec un gode ceinture, un gode chair, en regardant l’autre se masturber sans avoir le droit d’y toucher de suite, les yeux bandés… tant que je sens que ça fait monter le plaisir.

En terme de position, il est plus facile pour moi d’éprouver du plaisir quand je suis sur le ventre. Cela vient aussi du fait que avoir du plaisir sous les yeux de quelqu’un cela peut être un peu intimidant…

J’ai des séquelles des violences subies quand j’avais 9 ans donc parfois je vais le dire clairement : mon anus c’est hors de question alors que je sais pourtant que les orgasmes les plus puissants ont toujours fait intervenir cette zone érogène de mon corps.

Ton ressenti pendant un orgasme…  

Je ne catégorise pas mais ils ne sont pas du tout tous pareils. Les très bons orgasmes souvent je me marre, il y a une espèce de rire de soulagement. La plupart du temps, je raccroche assez vite, j’ai pas trop de périodes de latence notamment parce que je fais souvent l’amour dans la journée et ça me file pas mal la pêche. Je sais que fais pas mal de bruits car on me le dit et puis parfois je sens que ça tire un peu sur les cordes vocales juste après…

La plupart du temps c’est plutôt en mode explosion j’ai le corps qui se tend, j’ai l’impression de me répandre vers l’extérieur. Cela m’arrive de temps en temps d’avoir un orgasme plutôt implosif, un truc qui se resserre brutalement, qui part du milieu et qui va vers les extérieurs. Souvent d’ailleurs, ce type d’orgasme me laisse des petites fourmis au bout des doigts et des orteils.

Créer des moments érotiques en couple… 

C’est vraiment très difficile avec ma femme depuis la naissance notre fille. Déjà, il y a eu le moment juste après. J’ai eu une épisiotomie et franchement je n’étais pas dedans. Notre fille dormait dans notre chambre, je l’allaitais pendant 6 mois c’était beaucoup plus compliqué. Finalement, quand tu te retrouves à deux, cela devient des moments de repos plus que des moments où on s’excite mutuellement.  De plus, je trouve que mon vagin a pas mal changé, je sais qu’il y a des zones érogènes de de mon vagin que je reconnais du bout des doigt qui se sont déplacées. C’est pas vraiment une perte de confiance parce que je ne brandis pas  mon sexe en disant que ça va séduire quelqu’un mais voilà, il a fallu se retrouver.

Il y a aussi des aléas qui font que ma partenaire a aussi moins envie. Entre ce que je vis à la maison au niveau érotique et ce que je vis à l’extérieur, cela n’a rien à voir. Et ce n’est pas parce que je ne désire par ma femme ! Non, c’est juste que, on a plein d’autres trucs en tête ensemble qui font que c’est plus difficile… C’est toujours un équilibre très tendu entre le fait d’en parler et, en même temps, si on en parle trop, la prochaine fois qu’il y en a une qui initie quelque chose on va avoir en tête toutes ces conversations en mode grosse pression « Il faut y aller il faut y aller » donc c’est difficile. Je sais que c’est un peu cliché, mais, quand on a passé une soirée au restaurant, qu’on a bu un ou deux verres de vin, parfois ça évite de ressentir cette pression due à une conversation récente sur le sujet. On essaie des choses comme un massage mais sans arrière-pensée pour essayer de re-détendre un peu la situation. On se le redit souvent ; ces moments font aussi partie de notre vie sexuelle.

Comment arrives-tu à faire croître ton potentiel érotique… 

Ce qui m’aide, ce sont les rencontres avec des personnes qui disent avoir des vies sexuelles épanouies, d’autres qui vivaient des contrats amoureux différents de ce que nous on vivait. Cela passe aussi par de rencontres érotiques avec des gens qui proposent des choses auxquelles je n’aurais pas forcément penser, qui expriment un plaisir particulier. Par exemple, je rencontre quelqu’un qui pratique le shibari, je me renseigne sur les cordes et j’essaie…

Avec ma femme, on a été monogame pendant longtemps avec l’idée que c’était possible de faire différemment. Quand j’ai eu d’autres relations, dans notre entourage, il y avait des milieux où on pouvait le dire un peu, d’autres beaucoup et des milieux où on ne pouvait pas du tout en parler. Mais je suis bien entourée, ça m’arrive d’aller déjeuner chez mes beaux-parents le dimanche midi en parlant ouvertement des autres personnes que je vois. Quand j’ai rencontré C. qui a 65 ans, j’étais un peu intimidée, je me demandais si une personne de cet âge avait besoin de lubrifiant… mais quelques années après, on, a une vie sexuelle très active, ça a beaucoup changé, elle lubrifie naturellement beaucoup plus qu’avant et en est très heureuse !

J’ai de plus en plus de mal à me sentir attirée par des hommes. Ce n’est pas une question de désir mais les personnes dont j’ai envie de me rapprocher, aujourd’hui j’ai besoin qu’elles soit alertées sur certains sujets. Par exemple, un mec qui pense uniquement « pénétration de son phallus », ça va être très rapidement rédhibitoire. Avant d’avoir une relation avec un mec, je lui demande comment il se sent à l’idée d’être pénétré. Evidemment, on a tous des trucs qu’on aime et d’autres non mais dans la façon dont ils réagissent et dont ils en parlent, je vais continuer ou pas…. Même si j’en ai rencontré qui sont capables de le prendre très bien et de comprendre qu’il y aura plein d’autres jeux érotiques avec beaucoup de plaisir, cela reste rare. Quand je fais l’amour avec une femme, on sait que tout est libre et on peut dire non sans aucune pression à la pénétration.