J’ai fait un atelier de masturbation quand j’étais au Mexique. Ces 2 jours ont été un grand moment de ma vie sexuelle. Nous étions en mixité choisie, il y avait, avant la masturbation, ces échanges entre femmes de partages, d’expériences, etc. Nous avons reçu également de nombreuses informations sur la sexualité, l’orgasme, comment cela fonctionne…

Ta première émotion érotique…

Je devais avoir 12 ans et j’étais amoureuse d’un fils d’amis de mes parents qui avait 15 ans. J’étais folle amoureuse de lui et évidemment, je ne lui disais pas. Et puis un jour, j’ai rêvé de lui. C’était très chaste, nous dormions ensemble et il me prenait dans ses bras comme lorsque tu dors à deux en cuillère et cela m’avait vraiment beaucoup excitée, sans vraiment comprendre ce qu’était cette sensation nouvelle… Je suis restée au lit très longtemps ce matin-là car je voulais absolument retourner dans ce rêve. Ensuite, je n’ai cessé d’essayer de me remémorer cette image, de m’immerger dans cette sensation. Encore aujourd’hui, cela demeure une image très excitante pour moi.

La place du plaisir dans ta vie ?

J’y accorde une place importante. Il y a des choses que j’identifie assez clairement qui me font plaisir et je fais en sorte qu’elles arrivent assez souvent ! Je suis très gourmande, manger est pour moi source d’un grand plaisir. 

Quand je danse également, je ressens des émotions très vives qui peuvent me dépasser. Je recherche cette sensation de plaisir intense, si une musique me procure ça, je vais l’écouter en boucle. Je considère que nous avons la chance d’être en vie donc autant se faire plaisir ! J’essaie d’avoir cet état d’esprit là.

L’entente avec ton corps…

Je m’entends pas trop mal avec mon corps aujourd’hui, de mieux en mieux je dirais. Mais cela demeure un gros sujet. Le féminisme m’a aidé à déconstruire plein de choses, des cercles de parole en non mixité m’ont également aidé. Aller un peu dans les “extrêmes” parfois où j’ai carrément arrêté de m’épiler. J’avais besoin de me confronter à mon corps lorsqu’il n’est pas “maltraité”, ce à quoi il ressemble vraiment. Finalement, ce n’est pas si pire et même si tu as des poils aux mollets, si tu plais à un mec, il ne va pas te jeter pour ça. Et s’il le fait c’est un connard donc au bout d’un moment tu relativises…

Concernant mon apparence physique, j’ai longtemps pensé que je n’étais pas assez mince, pas assez musclée, pas assez ci, pas assez cela et puis finalement aujourd’hui, je me sens plus à l’aise. Mon poids s’est stabilisé, pas forcément dans ma fourchette basse mais rien que le fait d’avoir un poids stable me fait me sentir mieux. Il y a encore des moments difficiles comme les premières fois l’été en maillot de bain où tu te compares aux autres… Mais on en revient au plaisir, pour moi c’est plus important de manger une pizza 4 fromages que de ressembler aux canons de beauté.

Ce qui m’a beaucoup aidé, c’est d’en discuter avec de nombreuses femmes. Là, tu réalises que nous sommes quand même vraiment nombreuses à ne pas aimer notre corps alors que toi tu les trouves magnifiques ces femmes-là. On nous martèle la tête “tu n’as pas le corps qu’il faut “mais finalement, même celles qui ont le corps qu’il “faut”, elles ne s’aiment pas plus que toi donc tu relativises !

Parlons auto-érotisme…

Je me masturbe parfois mais pas très souvent. J’ai découvert ça très tard à 21 ans. Les moments où je vais me masturber sont une journée où je suis toute seule avec l’envie de me faire plaisir. Je vais m’acheter un plat qui me fait plaisir pour manger le midi, je vais regarder un film et puis je vais prendre un moment pour me masturber. Parfois, cela peut être un besoin fort d’expulser quelque chose, et dans ce cas là, je regarde du porno.

Beaucoup de choses m’excitent dans le quotidien qui ne sont pas du tout érotiques à la base. Par exemple, un jour, un mec dans le train qui avait un pantalon tâché de peinture, sans doute un peintre en bâtiment… Un autre jour, je me promenais au bord d’une rivière, il y avait une centrale  électrique avec une machine avec un bras qui rentrait dans l’eau lentement, qui ressortait, qui rentrait, puis qui sortait. Cette image m’avait beaucoup excitée !

Parlons excitation sexuelle…

Je suis excitée par les situations de soumission. J’aime que mon mec me mette des fessées. C’est quand même assez soft, on a pas tous les accessoires mais j’aime bien me faire tirer les cheveux et me faire cracher dessus. Sur le moment, j’y vais à fond et puis après je me questionne. Pourquoi j’aime ça ? Est-ce que c’est ok avec mes idéaux féministes ? Mais cela ne m’empêche pas de kiffer. J’aime également être dans des situations de domination même si c’est un peu plus dur à assumer, mais je pense que c’est beaucoup lié à nos représentations en fait…

En termes de pratiques, j’aime beaucoup mes seins et ce qu’ils me font ressentir. D’ailleurs, lors de mes premières expériences sexuelles, j’étais persuadé que je jouissais des tétons. Ensuite, j’ai compris que c’était car, en même temps, je me frottais contre mon mec. En tout cas, c’est une zone très érogène pour moi. 

J’ai eu des difficultés avec le cunnilingus, j’ai été longtemps persuadée que j’étais incapable de jouir de cette manière. De manière générale, j’ai l’impression que je suis assez longue pour venir et je commence à penser “le pauvre, ça fait 20 minutes qu’il y ait” et après je n’arrive plus à jouir. Ce qui m’a beaucoup aidé, c’est mon mec d’aujourd’hui attentionné et avec qui je communique beaucoup. Car vraiment, il n’y a rien de pire qu’un mauvais cunnilingus ! Je me réconcilie doucement avec cette pratique… Et puis j’aime également me masturber quand je suis avec l’autre. Souvent, c’est moi qui vais me faire jouir et lui, en même temps, il va s’occuper de mes seins. J’arrive mieux à jouir comme ça donc c’est devenu un peu un truc entre nous. Souvent à la fin, on s’occupe de moi.

Au début, je couchais avec des mecs parce que j’étais une fille et puis après j’ai couché avec des filles et encore après, j’ai re-couché avec des mecs. Et aujourd’hui, j’ai l’impression de beaucoup plus aimer le corps des garçons. J’apprécie le fait que mon chéri soit un mec et qu’il ait un corps de garçon, je suis excitée par son torse, ses fesses,et c’est plutôt nouveau pour moi.

Quels sont tes sensations lors d’un orgasme ?

Je sens une perte de contrôle. Je sais très bien déjà quand j’ai un orgasme ou pas. Souvent, je sens que ça vient par les pieds, c’est le premier signe, je sens des picotements et ça se tend un peu dans cette zone. Et ensuite, la perte de contrôle arrive; je crie, je ne peux pas ne pas faire de bruit, c’est vraiment un truc plus fort que moi. Sur le moment, c’est un truc très intense et après, ça se détend et arrive un grand soulagement avec le sourire.

Créer des moments érotiques en couple… 

Cela fait 6 ans que je suis avec mon copain et ce n’est qu’ à partir du confinement que cette question s’est posée. Ni l’un ni l’autre, on se disait : “On fait pas assez l’amour”, “c’est moins bien”, “on est plus éloigné qu’avant”… Par contre, le confinement a marqué une étape. Il y a deux choses principales qui m’aident : se toucher dans le quotidien et dormir tout nu. Au début, lorsque nous étions ensemble, on dormait tout le temps tout nu, puis à un moment, on a commencé à mettre des t-shirts, etc. Puis, on s’est dit : “non, on va re-dormir à poil” car le fait d’être tous les deux dans un lit nu, même si ça ne va pas forcément amener à chaque fois à faire l’amour, cela entretient une intimité.

D’autres trucs aident dans le quotidien comme envoyer un petit texto dans la journée lorsque nous ne sommes pas ensemble. Parfois, justement je sais qu’il y a des trucs un peu improbables qui vont m’exciter et à ce moment-là j’aime bien lui dire. Je rêverais qu’on s’envoie des longs scénarios par texto, mais il n’est pas très texto, donc c’est plutôt lapidaire de son côté. 

Il y a aussi le secret des moments, c’est à dire que maintenant, on se réserve des moments pour faire l’amour et ce, beaucoup plus qu’avant. Au bout d’un moment, la routine, le quotidien et puis le confinement, cela ne venait plus si souvent…. Parfois, le week-end on se dit : “cette après-midi on fait l’amour”. On prend une douche, on se prépare, on met une petite musique… même si on n’est pas forcément excité à la base. Et finalement, très souvent ce sont des moments trop bien. Je kiffe beaucoup plus parce que je suis vraiment là, on a le temps, il n’est pas 23h où tu es fatiguée et pense à ton réveil du lendemain.

Comment arrives-tu à faire croître ton potentiel érotique… 

J’ai fait un atelier de masturbation quand j’étais au Mexique. Ces 2 jours ont été un grand moment de ma vie sexuelle. Nous étions en mixité choisie, il y avait, avant la masturbation, ces échanges entre femmes de partages, d’expériences, etc. Nous avons reçu également de nombreuses informations sur la sexualité, l’orgasme, comment cela fonctionne…

Je suis contente d’avoir couché avec pas mal de gens différents de sexe différents. Même si je pense que l’on peut être heureux en ayant peu de partenaires, c’est un truc qui m’a fait grandir et comprendre des trucs sur les envies que l’on peut avoir individuellement, sur ce que j’aimais ou pas.

Je lis énormément de livres sur la sexualité, je suis très curieuse. Mon mec se moque de moi, il dit que je prends tous les livres qui parlent de cul à la bibliothèque et que je vais être fichée… Mais ça me fascine vraiment en fait de lire des gens qui racontent leur sexualité, de lire des écrivains qui parlent de ça, de voir des films sur le sujet.

Le porno m’a aidé aussi, ça m’a décomplexé sur plein de trucs. Même si certaines choses sont critiquables dans le porno, on voit quand même des gens qui sont excités, qui baisent, bavent, crient… Cela m’a ouvert des imaginaires sur des choses inattendues qui m’excitent beaucoup comme voir deux mecs ensemble. 

Le féminisme bien sûr m’a aidé à avoir une sexualité épanouie, c’est-à-dire une sexualité respectueuse où je sais poser mes limites. Je me suis rendue compte de choses que j’avais vécues avant. Aujourd’hui je ne veux plus les vivre et j’ai appris à dire non.

Je vais terminer avec ça, on en parle beaucoup avec mes copines. Enfin, avec certaines copines pas avec toutes. On a un groupe WhatsApp où on s’écrit souvent des messages. Cela arrive hyper souvent qu’on s’envoie des vocaux pour parler de ça et, entendre leurs expériences, de voir comment cela fonctionne chez elle, ce qui les fait jouir, pas jouir, comment elles font… Cela m’aide à grandir !